KOMAIT ABDALLAH – L’influence de l’art de la catacombe sur l’art de la mosaique

L’influence de l’art de la catacombe sur l’art de la mosaique de Syrie du Nord à l’époque byzantine.
Komait Abdallah (Université Paris I Panthéon-Sorbonne)

A l’époque byzantine en Syrie, les panneaux des mosaïques ont été ornés de motifs divers : géométriques, floraux, animaliers et architecturaux. Ces motifs ont marqué la rupture avec les traditions décoratives gréco-romaines qui ont dominé l’art de la mosaïque syrienne du Ier jusqu’au IVe siècle. Ce nouveau goût décoratif est lié sans doute à l’apparition du nouveau commanditaire qu’est l’Église.

À partir du Ve siècle, on constate la diffusion de scènes animalières dans les mosaïques de Syrie du Nord. Certaines de ces scènes sont composées de deux animaux symétriques, séparés dans la majorité des cas par un objet axial : les couples de paons affrontés d’un vase, d’oiseaux affrontés soit d’une fleur, soit d’une colonnette, de taureaux affrontés d’une fontaine, d’agneaux affrontés d’une amphore ou d’une inscription et de poissons affrontés d’une ancre.

Certains considèrent que ces motifs sont issus du répertoire oriental local et qu’ils sont exempts de toute influence classique. Cependant, certains de ces motifs sont déjà attestés dans les catacombes italiennes datées des IIe-IVe siècles. Il pourrait donc y avoir un rapport probable – tant iconographique que symbolique – entre l’art de la catacombe et l’art de la mosaïque en Syrie du Nord à l’époque byzantine. Tous ces motifs dessinés dans les catacombes de Rome portent des symboles chrétiens, ce qui confirme la valeur symbolique de ces mêmes scènes représentées sur les mosaïques. La représentation de ce genre de motifs, surtout sur des mosaïques pavant des sanctuaires, renforce cette idée.

Du fait de l’interdiction du christianisme à l’époque romaine, les premiers chrétiens affichèrent discrètement leur foi par l’iconographie des catacombes. Ce sont les chrétiens des provinces qui ont réutilisé les mêmes images symboliques aux Ve et VIe siècles dans leurs sanctuaires afin de présenter les mêmes idées, quand le christianisme était devenu religion d’État.

JEANNE DEVOGE – Les échanges artistiques entre Orient et Occident illustrés par un livre de Job

Les échanges artistiques entre Orient et Occident illustrés par un Livre de Job byzantin du XIVe siècle : le Paris. gr. 135 de la BnF.
Jeanne Devoge (Université Paris I Panthéon-Sorbonne)

Les quinze Livres de Job illustrés conservés jusqu’à ce jour dans les bibliothèques de divers pays reflètent une tradition byzantine qui remonte au moins au VIIIe siècle. Dans ces Livres a été recopié le texte de Job, agrémenté de commentaires patristiques et illustré par des cycles d’images plus ou moins importants. Ces images appartiennent pour la plupart au répertoire iconographique et stylistique byzantin ; les deux exceptions sont le Paris. Gr. 135 (deuxième moitié du XIVe siècle) de la Bibliothèque nationale de France et le codex Laud. Gr. 86 de la Bodleian Library à Oxford (milieu du XVIe siècle). Ces deux manuscrits sont les plus récents du corpus de Livres de Job illustrés ; si les illustrations du Laud. 86 témoignent clairement de leur appartenance au monde vénitien du XVIe siècle, il n’en va pas de même pour celles du Paris. Gr. 135. En effet, malgré la structure byzantine de ce Livre de Job produit à Mistra ou à Constantinople et le respect du cycle iconographique traditionnel, le style de l’artiste étonne par son éclectisme et son originalité. Au goût du détail viennent s’ajouter des emprunts artistiques venus à la fois d’Orient (conception de l’espace, motifs végétaux décoratifs, certains gestes des personnages) et d’Occident (architectures typiquement gothiques, codes vestimentaires).

Cette assimilation de techniques et de styles variés pose la question de la formation de l’artiste et incite à trouver des points de comparaison pertinents avec d’autres manuscrits copiés et enluminés dans le monde arabo-musulman et dans le monde occidental chrétien.

DILEK SEN – Contexte économique et culturel à Patara en Lycie

Contexte économique et culturel aux Ve-VIIe siècles à Patara en Lycie : le cas du mobilier des thermes portuaires de Patara.
Dilek Sen (Université Paris I Panthéon-Sorbonne)

Cette communication consistera principalement à donner un aperçu de nos recherches pour notre thèse de doctorat intitulée « La céramique post-romaine de Lycie. Étude du mobilier des thermes portuaires de Patara « Hurmalik Hamami » ».

Placée à l’embouchure du fleuve Xanthos, non loin des établissements du Letôon et de Xanthos, Patara était l’une des six villes principales de Lycie, région qui se trouve aujourd’hui au sud de la Turquie. Centre politique important à l’époque grecque, Patara a su profiter surtout de sa position géographique privilégiée devenant aux époques romaine et protobyzantine le port marchand le plus important de la côte lycienne. Situés sur la voie reliant l’amphithéâtre à la porte dite de Modeste, les thermes du port (Hurmalik Hamami) sont un des quatre bains de la ville à l’époque romaine. Par son emplacement portuaire, le bâtiment thermal offre vraisemblablement une vision assez sûre de l’activité commerciale de la ville qui dépendait principalement de l’activité commerciale assurée par son port.

Dans le but d’identifier les différentes phases d’utilisation et de réaménagement du bain, les fouilles reprisent en 2005 ont révélé des séquences stratigraphiques complètes ainsi que des lots de matériel relativement bien préservés et qui semblent majoritairement appartenir à une phase homogène datée des V-VIIe siècles ap. J.-C.

Notre intérêt se portera particulièrement sur le mobilier céramique d’importation (terres sigillées, lampes et amphores) issu du secteur des thermes portuaires. L’étude de ces céramiques devrait donc permettre d’évaluer le dynamisme commercial de la ville et de définir les liens culturels avec les autres régions de Méditerranée orientale.

JUDITH SORIA – Le mont Athos et sa périphérie

Le Mont Athos et sa périphérie : l’exemple d’ateliers actifs à Voskopojë au XVIIIe siècle.
Judith Soria (INHA/EPHE, 5e section)

Après la chute de Constantinople, la culture byzantine orthodoxe s’organise autour d’autres centres religieux et artistiques, souvent monastiques. Cette communication peut être l’occasion d’un éclairage sur les échanges artistiques entre le Mont Athos et les provinces voisines en particulier dans le Sud de l’Albanie, à la lumière des peintures murales réalisées à Voskopojë au XVIIIe siècle par différents ateliers qui ont également été actifs au Mont Athos. Les carrières de ces ateliers sont souvent méconnues et il reste difficile d’en connaître le développement. Il existe toutefois deux ateliers ayant travaillé à Voskopojë et au Mont Athos qui sont bien référencés, les frères Athanase et Constantin d’une part et David Selenica d’autre part. Pour ces deux ateliers, la place de leur travail sur la Sainte Montagne n’est pas la même dans le déroulement de leur carrière. En effet, l’œuvre de David Selenica peut être rattachée à un courant proprement athonite qui prône une retour au style et à l’iconographie de la période paléologue. En revanche, les frères Constantin et Athanase, originaires de Korça, forment un atelier épirote invité à travailler au Mont Athos, comme beaucoup d’autres au XVIIIe siècle.

C’est donc une relation d’échange entre le Mont Athos et sa périphérie, entre les peintres de tradition athonite et les peintres des provinces alentour qui viennent y travailler qui semble primer. En effet, la peinture athonite est enrichie par les artistes « provinciaux » qui sont appelés pour y travailler, et est exportée dans ses mêmes provinces par d’autres ateliers de tradition athonite.

SEVTLANA SOBKOVITCH – Tradition artistique byzantine et la Russie ancienne

Tradition artistique byzantine et la Russie ancienne : les icônes de la Dormition.
Svetlana Sobkovitch (EPHE, 5e section)

La Russie ancienne entretint avec Byzance des liens variés, pourtant souvent coupés par des conflits. Il y avait cependant un lien particulièrement stable, celui du domaine du sacré. Dans son art religieux notamment, la Russie suivit les modèles reçus de Byzance et se nourrit de ses influences tout au long de son histoire. Parallèlement, l’éloignement et les coupures dans les relations rendirent possible l’apparition dans l’art russe d’éléments locaux.

Les premières images sacrées connues en Russie suivent de près les images byzantines ; ces œuvres sont soit importées soit créées sur place par des maîtres invités. C’est dans le travail des élèves russes de ces artistes étrangers qu’apparaissent avec le temps des traits originaux. Les influences byzantines se ressentent néanmoins toujours, jusque dans les œuvres les plus tardives ; on peut suivre cette tendance à travers un ensemble d’icônes de la Dormition de la Vierge.

Les premières icônes russes de la Dormition, datées des XIIIe-XIVe siècles, ont ainsi peu de spécificités locales mais ressemblent fort aux œuvres byzantines. Au tournant des XIVe et XVe siècles apparaissent des éléments distinctifs de la peinture russe : iconographie concise, sans détails superflus, palette claire, vive. Dans certaines œuvres de la même époque, on distingue pourtant des traits qui renvoient aux développements observés à cette période dans l’art byzantin, dont la multiplication des détails et le dramatisme des expressions. Après 1450, apparaît une iconographie de la Dormition spécifique à Russie, c’est-à-dire complétée par l’épisode de l’Assomption. Cependant, même ces œuvres tardives ne s’éloignent pas du modèle byzantin.

On notera enfin l’inégalité de la réception de ces influences en Russie. A Novgorod, ville lointaine du Nord, la peinture est d’un caractère plus original, « local » ; les goûts qui y prédominent sont plus populaires. Autre grand foyer artistique, Moscou fut une ville princière avec davantage de liens avec le monde byzantin ; sa peinture est souvent plus sophistiquée, élaborée et suit de plus près les développements dans l’art de Byzance. Ces influences furent enfin aussi très variées, provenant tant de la capitale et des villes majeures byzantines que des provinces de l’empire.