GIOVANNI STRANIERI – Les apports récent de l’archéologie de l’habitat rural et des paysages agraires

Les apports récents de l’archéologie de l’habitat rural et des paysages agraires à l’histoire du haut Moyen Âge dans les Pouilles.
Giovanni Stranieri (Université Lumière-Lyon 2)

À l’occasion des 2èmes rencontres, a été exposée devant cet auditoire une étude de cas portant sur l’analyse archéologique d’un exemple de grand parcellaire en pierre sèche des Pouilles (Italie sud-orientale). On y démontrait, à l’échelle micro-territoriale, l’important potentiel d’information recelé par ces structures agraires afin de retracer la relation entre les hommes et le milieu, l’organisation territoriale, l’histoire économique et sociale de la région, notamment pour la période très mal connue – mais décisive – du haut Moyen Âge. À cette période la région est une zone-frontière aux marges des mondes byzantin, lombard et (bien que de manière plus épisodique) arabe.

Pour ces 3èmes rencontres, il est proposé de changer d’échelle : la communication portera sur une synthèse des données archéologiques (éditées et inédites) concernant l’habitat et les paysages à l’échelle d’un territoire assez vaste, au cœur de la région étudié, pour la période allant du VIe au XIe siècle.

En effet, les recherches archéologiques ont apporté, depuis deux voire trois décennies, beaucoup de connaissances nouvelles qui permettent, désormais, de réactiver une vision problématique de cette frontière médiévale particulièrement mal connue, tant qu’on ne disposait que des sources documentaires, très rares tant sur le front byzantin que sur le versant occidental. Après avoir fait le point sur les données archéologiques disponibles, il paraît également utile de proposer un dialogue avec les études de linguistique historique et avec l’histoire rétrospective des cadres juridiques, deux traditions d’études particulièrement vivantes jusqu’aux années Soixante en Italie mais qui ont été depuis délaissées.

Aussi cette démarche se veut un banc d’essai pour une collaboration interdisciplinaire de plus en plus étroite entre géographes, historiens, archéologues et linguistes, chacun affinant de plus en plus sa propre boîte à outils et l’analyse de ses séries de données, tous contribuant à répondre aux questions posées par une problématique commune : la compréhension des dynamiques qui régissent la mise en place et les évolutions d’un espace de frontière au haut Moyen âge, dans le cas d’étude de la Pouille entre Byzantins et Lombards.

GIOVANNI STRANIERI – La Pouille byzantine et lombarde

La Pouille byzantine et lombarde (VIe-XIe siècles). Paysages, territoires et sociétés d’un espace de frontière à la périphérie de l’Occident.
Giovanni Stranieri (Université Lyon 2 / E.H.E.S.S.)

À partir de la fin du VIe siècle, la région de la Pouille, en Italie méridionale, devient une zone-frontière aux marges des mondes byzantin, lombard et, plus tard, arabe. Dans le courant des VIIe-VIIIe s., la Pouille subit la déstructuration du système urbain, territorial et économique tardo-antique et intègre en grande partie le duché lombard de Bénévent. Toutefois, elle reste toujours dans l’orbite de Byzance, qui contrôle l’extrême sud de la région, autour du port d’Otrante. Plus tard, dans la seconde moitié du IXe s., l’Empire rétablira son pouvoir sur toute la région, avant que celle-ci ne soit définitivement réintégrée à l’Occident par les Normands, dans le cadre d’un inédit et durable ensemble sud-italien : le Regnum Siciliae.

Quelles sont les répercussions de ces bouleversements politiques, ethniques et militaires sur le peuplement, l’habitat, les paysages et la production agraire, en un mot sur l’organisation des espaces et des sociétés régionales ?

Pour répondre à cette question, un programme d’archéologie des paysages a été mis en place. Son objectif consiste à : 1) caractériser les transformations des espaces apuliens, entre le VIe et le XIe s. ; 2) définir la part spécifique de ces changements qui peut être attribuée au partage de la région entre sphères politiques, économiques et culturelles différentes.

Si la lecture archéologique du terrain est au cœur de la problématique et de la méthodologie de ce programme de recherches, d’autres sources sont sollicitées, dans un cadre résolument interdisciplinaire : il s’agit de la relecture régressive des données géohistoriques fournies par les rares sources byzantines et lombardes puis par les sources médiévales et modernes, de la linguistique historique, de l’histoire du droit et des coutumes.

Dans le cadre de ces Rencontres, seront présentés, d’abord, la problématique et le cadre méthodologique de ces recherches, puis, une étude de cas portant sur l’analyse archéologique des délimitations agraires de la région. Ces dernières, qui se présentent sous la forme d’imposantes murailles en pierre sèche, ont révélé un très important potentiel d’information lors d’une opération de fouille menée récemment et dont la publication dans la revue « Archeologia Medievale » n° 36 (Edizioni All’Insegna del Giglio, Firenze, Italia) est imminente.