LUISA ANDRIOLLO – Empire unitaire et contextes régionaux

Empire unitaire et contextes régionaux : Constantinople et les provinces dans les épistoliers du Xe et XIe siècle.
Luisa Andriollo, Université Paris – Sorbonne

Tout en gardant une structure ecclésiastique et d’État centralisée et une vocation universelle, l’empire byzantine fut toujours un empire multiethnique: à l’intérieur de ses frontières, qui s’étendaient au début du XIe siècle de l’Italie méridionale à la Syrie et au Caucase, on rencontre en fait des situations géographiques et culturelles très variées et des particularismes régionaux importants.

Mon projet de recherche, qui se déroule dans le cadre d’une cotutelle entre l’Université Paris IV et l’Université de Pise et sous la direction de J.-C. Cheynet, porte sur les relations entre Constantinople et les provinces et sur le rôle joué dans ce contexte par l’aristocratie, essentiellement micrasiatique : elle représente en fait entre IXe et XIe siècle le groupe social à travers lequel se réalise le lien entre pouvoir central et territoires périphériques.

Dans mon intervention je me propose d’illustrer cette gamme de relations telle qu’elle ressorte de la témoignage des textes épistolaires. En fait, parmi les sources à notre disposition les épistolaires  du Xe et XIe siècle offrent un regard particulièrement intéressant sur les rapports entre les provinces et la capitale. D’un côté ils laissent paraître l’attitude de l’administration centrale et des milieux constantinopolitains à l’égard des territoires périphériques de l’empire, qui se balance entre préjugés, sentiment de supériorité et intérêt pour l’exploitation des ressources provinciales. Au même temps ils témoignent aussi des particularités régionaux, des faits et des problèmes locaux et de la perception du pouvoir central, représenté par l’empereur et ses fonctionnaires, par les gens qui vivaient en province ou qu’y avaient des intérêts.

RENATE DEKKER – Episcopal activity in Late Antiquity

Episcopal activity in Late Antique Egypt: Theban bishops at work.
Renate Dekker, Université de Leyde

My research examines the social role of bishops in Late Antique Egypt, particularly in the Theban region (near modern Luxor), in a period that decisively shaped the history of the Coptic Orthodox Church and that of Egypt in general (ca. 600-641).

During this period, the doctrinal conflict over Christology at the Council of Chalcedon (451) became a definite schism, for the anti-Chalcedonian movement in Egypt rapidly developed into a separate church hierarchy alongside the official one, which was supported by the Byzantine state. This oppositional church is the forerunner of the present-day Coptic Orthodox Church. The beginning of the seventh century was also marked by political unrest, caused by the Persian invasion, the reconquest of Egypt under the Emperor Heraclius, and the oppressive religious policy by the Byzantine state.

Whereas the Chalcedonian bishops presumably resided in or near the cities, their anti-Chalcedonian counterparts mainly operated from monasteries in the countryside and seem to have formed a stabilizing factor in this dynamic society. Direct information about the anti-Chalcedonian church is provided by the professional archives of the bishops Abraham of Hermonthis and Pesynthios of Koptos, which are unique sources of factual information on episcopal activity, unlike the literary texts that we usually examine. By analyzing the specific nature of the contacts and social involvement of Abraham and Pesynthios on the basis of their archival documents, it will be possible to evaluate their role as social agents and to correct the idealized images of bishops as presented by normative texts.

ELENA NONVEILLER – La gête des Broumalia de Rome à Byzance

La fête des Broumalia de Rome à Byzance : continuité ou ré-invention idéologique ?
Elena Nonveiller, École des Hautes Études en Sciences Sociales

L’État et l’Église romains d’Orient, dans son histoire millénaire, ont alterné la tendance à interdire et condamner toute une série de fêtes, rites et pratiques religieuses non officielles, dites ‘païennes’ ou ‘démoniaques’, en tant que dangereuses  pour la stabilité politique et sociale, avec la tendance à masquer leur hétérodoxie en les assimilant. Très souvent ces formes d’intégration ont produit des synthèses et des syncrétismes religieux très originels, où le paganisme n’est plus dissociable du christianisme. Lorsque les byzantins ont rétabli la célébration de certaines fêtes antiques, ils les ont élaboré et transformé pour les réadapter dans le nouveau contexte historique et socioculturel. Ces adaptations sont passées à travers une forme de ré-invention idéologique du paganisme gréco-romain, en raison de marquer chaque fois une continuité ou une fracture avec le passé pré-chrétien, conformément aux exigences économiques, politiques et sociales du présent. C’est le cas de l’ancienne fête romaine de la bruma qui a été transformée en Broumalia par les Byzantins, à travers un processus de ré-invention idéologique de l’Antiquité.

Dans la présente communication je me propose de remarquer certains aspects de ce processus par l’analyse de deux sources byzantines sur les Broumalia à différentes époques : l’une, au VIe siècle, constituée par la Chronique de Jean Malalas (récit du livre VII consacré à la fondation de Rome et à la création de rites et cultes par Romulus), l’autre, au Xe siècle, constitué par le Livre des cérémonies de Constantin VII Porphyrogénète (chapitre 18 du tome II de l’édition de J.J. Reiske, consacré à la description de la cérémonie solennelle du broumalion impériale).

CLAIRE FAUCHON – La vision du barbare en Orient à l’époque protobyzantine

La vision du barbare en Orient à l’époque protobyzantine : l’apport des sources syriaques.
Claire Fauchon, Université de Versailles St-Quentin-en-Yvelines

Dans ses analyses sur Byzance, le barbare et l’hérétique, É. Patlagean concluait que dans « la lutte de Byzance contre les peuples qui l’entourent, l’accent est mis désormais sur le motif de la chrétienté, d’une chrétienté qui demeure définie en même temps comme porteuse des valeurs universelles de la romanité ». Fantasmes répulsifs, les barbares sont pourtant loin d’être perçus comme un tout homogène. Notre but est d’étudier comment la notion de barbare et les topoi qui lui sont associés sont utilisés à la haute époque byzantine dans la documentation syriaque, par des populations chrétiennes de l’Empire byzantin, imprégnées de culture gréco-romaine mais dont l’identité même est d’appartenir à un groupe hétérodoxe qui doit résister à plusieurs envahisseurs : perses, puis arabes. Nous nous intéresserons plus particulièrement à un cycle légendaire syriaque connu sous le nom de Légende d’Alexandre. Ce cycle est composé de plusieurs textes rédigés en syriaque entre 629 et 677, au cours d’une période particulièrement trouble en Orient : invasions des Perses, massacres des chrétiens, reconquête byzantine puis invasions arabes. Ces textes mettent en scène Alexandre qui part civiliser les barbares aux confins de l’oikoumene et nous renseignent sur les représentations du barbare à cette époque. Cette documentation syriaque offre un point de vue complémentaire des sources grecques et permet d’examiner, sous un autre angle, les dynamiques socio-culturelles à l’œuvre en Orient, ainsi que la plasticité des stéréotypes et l’ampleur des interactions culturelles à l’œuvre dans ces sociétés orientales multiculturelles et multiconfessionnelles du haut Moyen Âge.

EVA DE RIDDER – Capita literature in Byzantium

Capita literature in Byzantium: The Capita Alia by Elias Ekdikos.
Eva De Ridder, Université de Louvain

In research on Byzantine literature, the genre of theological capita has not received the attention it deserves, as is shown by the few articles on this subject that have appeared hitherto. Capita or κεφάλαια form a collection of mystical sayings, each of which can separately act as a starting point for monks to meditate upon. The chapters treat different kinds of spiritual ideas and appear to be put together in random order. Although there are indications that, at least for some capita collections, a well-considered structure is indeed present, the key to unravel this structure has not yet been found.

The Capita alia, also called Anthologium gnomicum and allegedly written by Maximus the Confessor, is a representative of this genre. A critical edition of this work is yet to be made and is as such the aim of my PhD project. As far as we know, manuscript tradition handed down 82 copies, none of which date earlier than the 12th Century.

In my lecture I would like to discuss the different uncertainties that still exist about the Capita alia, starting off with a brief discussion about its unknown authorship. As stated above, in the MSS the Capita alia are often attributed to Maximus the Confessor and infrequently to other well-known authors. However, the greater part of the MSS points out Elias Ecdicus as the author, an ecclesiastic judge presumably from the 11th-12th Century. Apart from the authorship, there is also great variation to be found in the MSS as far as title, structure, and even the number of chapters are concerned.

Furthermore, I will address some of the aforementioned general features of the genre of chapters, as well as focus on more specific characteristics of the Capita alia in particular. At the end, special attention will be paid to the principles of structuralization and to the importance of identifying the most original sequence and structure of the chapters, in order to appreciate this compilation in a more precise way.