IPHIGENEIA DEBRUYNE – La popularité de l’apologue de la licorne du récit de Barlaam et Joasaph

La popularité énigmatique de l’apologue de la licorne du récit de Barlaam et Joasaph.
Iphigeneia Debruyne, Université de Provence

L’apologue de la licorne est un des dix apologues d’origine bouddhique intégré dans le récit grec de Barlaam et Joasaph, la première version chrétienne de la vie du prince Joasaph, un texte hagiographique et édifiant. Il s’agit de l’un des dix apologues du récit qui sont définis comme de leçons morales au préalable étrangères au monde chrétien. L’apologue de la licorne se distingue des neuf autres apologues intégrés dans le récit chrétien par les représentations figurant non seulement dans les manuscrits enluminés de Barlaam et Joasaph mais aussi indépendamment du texte. A Byzance, l’image de l’apologue de la licorne est, entre autres, illustrée dans des psautiers à illustrations marginales. En Occident, le bas-relief de Ferrare affirme l’autonomie que l’apologue de la licorne avait acquise depuis Byzance. L’apparition constante de l’apologue en dehors du contexte du récit témoigne d’une popularité dite énigmatique, d’une popularité dont les raisons méritent encore d’être explorés.

D’une part l’examen du cheminement littéraire de l’apologue de la licorne qui dépasse les frontières de la migration littéraire du récit de Barlaam et Joasaph, une étude des illustrations associées à l’apologue de la licorne du récit menée afin de déterminer d’éventuels prototypes et de la multitude de voies à travers lesquelles l’image et/ou le texte se diffusent, et d’autre part la comparaison des images de l’apologue issues de différents contextes littéraires, autorise de penser que la popularité de l’apologue n’est pas si énigmatique qu’elle ne le semble.

L’attestation précoce de l’apologue dans le monde chrétien d’Orient, mais aussi sa présence simultanée dans le recueil de fables arabe du VIIIe siècle, Kalîla wa Dimna, expliquent aisément la popularité de l’apologue. De même, cette recherche invite à proposer de nouvelles interprétations pour des images auparavant associées à l’apologue de la licorne du récit de Barlaam et Joasaph.