ELENA NONVEILLER – La gête des Broumalia de Rome à Byzance

La fête des Broumalia de Rome à Byzance : continuité ou ré-invention idéologique ?
Elena Nonveiller, École des Hautes Études en Sciences Sociales

L’État et l’Église romains d’Orient, dans son histoire millénaire, ont alterné la tendance à interdire et condamner toute une série de fêtes, rites et pratiques religieuses non officielles, dites ‘païennes’ ou ‘démoniaques’, en tant que dangereuses  pour la stabilité politique et sociale, avec la tendance à masquer leur hétérodoxie en les assimilant. Très souvent ces formes d’intégration ont produit des synthèses et des syncrétismes religieux très originels, où le paganisme n’est plus dissociable du christianisme. Lorsque les byzantins ont rétabli la célébration de certaines fêtes antiques, ils les ont élaboré et transformé pour les réadapter dans le nouveau contexte historique et socioculturel. Ces adaptations sont passées à travers une forme de ré-invention idéologique du paganisme gréco-romain, en raison de marquer chaque fois une continuité ou une fracture avec le passé pré-chrétien, conformément aux exigences économiques, politiques et sociales du présent. C’est le cas de l’ancienne fête romaine de la bruma qui a été transformée en Broumalia par les Byzantins, à travers un processus de ré-invention idéologique de l’Antiquité.

Dans la présente communication je me propose de remarquer certains aspects de ce processus par l’analyse de deux sources byzantines sur les Broumalia à différentes époques : l’une, au VIe siècle, constituée par la Chronique de Jean Malalas (récit du livre VII consacré à la fondation de Rome et à la création de rites et cultes par Romulus), l’autre, au Xe siècle, constitué par le Livre des cérémonies de Constantin VII Porphyrogénète (chapitre 18 du tome II de l’édition de J.J. Reiske, consacré à la description de la cérémonie solennelle du broumalion impériale).

CLAIRE FAUCHON – La vision du barbare en Orient à l’époque protobyzantine

La vision du barbare en Orient à l’époque protobyzantine : l’apport des sources syriaques.
Claire Fauchon, Université de Versailles St-Quentin-en-Yvelines

Dans ses analyses sur Byzance, le barbare et l’hérétique, É. Patlagean concluait que dans « la lutte de Byzance contre les peuples qui l’entourent, l’accent est mis désormais sur le motif de la chrétienté, d’une chrétienté qui demeure définie en même temps comme porteuse des valeurs universelles de la romanité ». Fantasmes répulsifs, les barbares sont pourtant loin d’être perçus comme un tout homogène. Notre but est d’étudier comment la notion de barbare et les topoi qui lui sont associés sont utilisés à la haute époque byzantine dans la documentation syriaque, par des populations chrétiennes de l’Empire byzantin, imprégnées de culture gréco-romaine mais dont l’identité même est d’appartenir à un groupe hétérodoxe qui doit résister à plusieurs envahisseurs : perses, puis arabes. Nous nous intéresserons plus particulièrement à un cycle légendaire syriaque connu sous le nom de Légende d’Alexandre. Ce cycle est composé de plusieurs textes rédigés en syriaque entre 629 et 677, au cours d’une période particulièrement trouble en Orient : invasions des Perses, massacres des chrétiens, reconquête byzantine puis invasions arabes. Ces textes mettent en scène Alexandre qui part civiliser les barbares aux confins de l’oikoumene et nous renseignent sur les représentations du barbare à cette époque. Cette documentation syriaque offre un point de vue complémentaire des sources grecques et permet d’examiner, sous un autre angle, les dynamiques socio-culturelles à l’œuvre en Orient, ainsi que la plasticité des stéréotypes et l’ampleur des interactions culturelles à l’œuvre dans ces sociétés orientales multiculturelles et multiconfessionnelles du haut Moyen Âge.

EVA DE RIDDER – Capita literature in Byzantium

Capita literature in Byzantium: The Capita Alia by Elias Ekdikos.
Eva De Ridder, Université de Louvain

In research on Byzantine literature, the genre of theological capita has not received the attention it deserves, as is shown by the few articles on this subject that have appeared hitherto. Capita or κεφάλαια form a collection of mystical sayings, each of which can separately act as a starting point for monks to meditate upon. The chapters treat different kinds of spiritual ideas and appear to be put together in random order. Although there are indications that, at least for some capita collections, a well-considered structure is indeed present, the key to unravel this structure has not yet been found.

The Capita alia, also called Anthologium gnomicum and allegedly written by Maximus the Confessor, is a representative of this genre. A critical edition of this work is yet to be made and is as such the aim of my PhD project. As far as we know, manuscript tradition handed down 82 copies, none of which date earlier than the 12th Century.

In my lecture I would like to discuss the different uncertainties that still exist about the Capita alia, starting off with a brief discussion about its unknown authorship. As stated above, in the MSS the Capita alia are often attributed to Maximus the Confessor and infrequently to other well-known authors. However, the greater part of the MSS points out Elias Ecdicus as the author, an ecclesiastic judge presumably from the 11th-12th Century. Apart from the authorship, there is also great variation to be found in the MSS as far as title, structure, and even the number of chapters are concerned.

Furthermore, I will address some of the aforementioned general features of the genre of chapters, as well as focus on more specific characteristics of the Capita alia in particular. At the end, special attention will be paid to the principles of structuralization and to the importance of identifying the most original sequence and structure of the chapters, in order to appreciate this compilation in a more precise way.

KATRIEN LEVRIE – L’art d’enfiler des perles. Le genre littéraire byzantin des chapitres

L’art d’enfiler des perles. Le genre littéraire byzantin des chapitres.
Katrien Levrie, Université de Louvain

On sait que la civilisation byzantine attachait beaucoup d’importance à sauvegarder la tradition. A cet égard, on peut entre autres constater que la littérature byzantine se caractérise par un effort de compilation. Dans ce rapport écrit, je me pencherai sur un genre de compilation particulier, celui des chapitres ou κεφάλαια. Pendant la période byzantine, plusieurs œuvres théologiques étaient présentées et structurées sous forme de collections de chapitres courts. Le nombre de chapitres pouvait en fait varier, mais en général, les auteurs compilaient un bon nombre de chapitres, souvent 100 (ou un multiple de 100).

Une telle collection de 100 chapitres était nommée centurie ou ἑκατοντάς. Ce qui est toutefois remarquable est qu’il n’existe souvent aucun lien évident entre les différents chapitres qui forment chacun en soi une unité visant à être lue et contemplée. Le genre littéraire des centuries prospérait dans les milieux monastiques où l’ensemble des chapitres avait pour but de stimuler la réflexion et l’ascèse auprès des moines.

Alors, cette sorte de littérature de compilation s’est presque dérobée à la vue des byzantinistes. A cet égard, il a semblé opportun d’examiner ce genre littéraire. Ma recherche se focalise sur la personne de Maxime le Confesseur (6e-7e siècles) et, plus particulièrement, sur deux œuvres qui lui sont attribuées, à savoir les Capita Gnostica (CPG 7707/11) et les De Duabus Christi Naturis (CPG 7697/13). Ces deux textes sont en effet exemplaires pour le genre des chapitres.

Dans cette intervention, je présenterai mon projet de recherche et les constatations que j’ai déjà faites quant au genre des chapitres en préparant une édition critique de ces deux textes.

JASMINA S. CIRIC – Remembrance of the Paradise

Remembrance of the Paradise: Tree of Life in Late Byzantine Architecture.
Jasmina S. Ćirić, Université de Belgrade

Paper explores artistic and exegetic contents of the wall surfaces in Late Byzantine church architecture. Taking into consideration that the brick was one of the main facade articulation materials, it is possible to understand the  «messages» represented with bricwork geometric ornaments, in critical terms of art history insufficiently identified as «aniconic decoration». Starting from the fact that the ornamental unit represents the image, the same can not contain aniconic but rather highly codified, dehumanized features. Arbor Vitae (xylon zoës, wood of life), motif identified in the key examples of Late Byzantine architecture in the exterior surface of the apse or or obtained by the appropriate positioning of the marble revetments next to the portals of the temple, presents a image of the ancient biblical metaphor “Blessed are those who wash their robes, that they may have the right to the tree of life and may go through the gates into the city” (Revelation 22: 14). Exegetic reading (‘décryptage’) of facade surfaces shows that visible finds its meaning in the invisible, but invisible finds its expression possibilities in the visible. Except the variety with brick represented schematized tree, were registered multidirectional placed geometric motives which that not only corresponds with monogram of Christ but also His Old Testament prefiguration tree of life. Arbor Vitae becomes coded image which shows remembrance of the Paradise where the God “placed on the east side of the Garden of Eden cherubim and a flaming sword flashing back and forth to guard the way to the tree of life” (Genesis 3: 24).