CATARINA FRANCHI – La mort d’Alexandre dans le Roman d’Alexandre

Ne te connaîtras-tu jamais toi-même, et ne comprendras-tu pas enfin que tu es mort ? La mort d’Alexandre dans le Roman d’Alexandre.
Catarina Franchi (Université d’Oxford)

Alexandre mourût, selon les éphémérides Royales rapportées par Plutarque et Arrien, le 28e jour du mois de Daisios, qui peut être traduit comme le 10 Juillet, 323 avant J.-C. Tous les grands et célèbres décesses tragiques de l’Antiquité, le topos de la mort virtuose de style homérique ne se retrouvaient pas, ces jours-là, à Babylone, et les historiens anciens n’ont jamais cessé de traiter la mort du Conquérant comme une sorte de mystère, de tragédie incompréhensible, de complément impossible d’une telle vie.

Sept mois s’étaient écoulés depuis la mort d’Héphaistion, sept mois de douleur et de progressive croyance aux signes, à l’astrologie, aux prodiges : Alexandre, après avoir quitté Ecbatane, où son ami était mort, décida de retourner à Babylone, et il avait déjà l’intention de partir vers l’Arabie, avec l’aide de Néarque, le capitaine de la flotte. Mais quelque chose arriva. Non seulement la demande de donner à Héphaistion les honneurs divins avait été repoussée, mais aussi des nombreux signes commençaient à se présenter autour d’Alexander.

En particulier, quatre sont les prodiges visées par les historiens : tout d’abord, le manque du lobe d’une victime sacrificielle, comme il est signalé par Plutarque et Arrien, l’histoire d’un normal soldat (mais dans certaines traditions, ce soldat est Séleucos), qui saut dans l’eau de l’Euphrate pour récupérer la couronne du roi qui était tombée de sa tête, comme on peut lire dans Arrien et Diodore; l’épisode d’un fou possédé par une μανία ­qui, sans une raison quelconque, et ne sachant pas ce qu’il faisait, s’était assis sur le trône d’Alexandre – le prodige le plus commun, car il est mentionné par tous les historiens, sauf Curtius, mais seulement parce que Curtius est manquant de toute la partie qui précéde la mort elle-même – ; enfin, l’assassinat d’un lion, symbole de la royauté, par un simple âne. Seul le Roman d’Alexandre, dont on parlera en détail dans quelques instants, parle de la naissance d’un garçon étrange, mi-homme mi bête, avec cinq faces bestiales sous ses membres.